Julia Bunel reste fidèle à elle-même. La sûreté et la force de son trait continuent à me frapper, grâce à la luminosité qu’elle projette sur les visages et la force sur les corps. Elle touche le regard de l’Autre grâce à un don total d’elle-même, à la sûreté du dessin et à la maîtrise de la palette. Son art, âpre et rugueux dès l’origine, allie entre autres les ocres et les bleus, lesquels se répondent toujours de façon harmonieuse.
Depuis quelques années, la densité de son dessin, qui donne une impression de peinture en relief, l’ont conduite à la sculpture. On y retrouve sa griffe, son âpreté mais aussi son envie de vivre. A force de creuser ce sillon, sa tentative s’est muée en réussite : La terre cuite vibre. Elle use aussi du toucher gras, soyeux de la stéatite, roche à la fois résistante et molle, donc façonnable, on peut l’imaginer, à l’aide d’outils simples. Principalement composée de talc, cette matière lumineuse, aux teintes vertes et riches en reflets, lui convient parfaitement, car elle y imprime la force de ses mains, l’intensité de son regard, l’expression de sa vie intérieure.
Julia Bunel, comme je l’ai noté depuis longtemps, ne cherche pas à flatter. Encore moins à épouser les modes, tomber dans l’artifice, la préciosité, le maniérisme. Dans le calme de son atelier, au cœur du Pays Basque, elle creuse et approfondit son œuvre. Désormais, celle-ci atteint sa pleine maturité, avec, me semble-t-il, une exigence d’authenticité et de vérité qui frappent le regard au premier coup d’œil et procure à celui qui contemple son œuvre un regain d’énergie.
Rémi Huppert - Écrivain (septembre 2024)
L'Artiste nous présente sculptures et peintures, en recherche d'une reconnaissance, d'une renaissance peut-être.
Il faut une certaine attention pour entendre ce que ces œuvres veulent nous signifier tant l'intime nous parle.
Au premier contact, les visages modelés, semblent évoquer une expression pathétique où le sujet semble offrir sa souffrance
ou son errance. Sculptures, devenues de véritables traces du réchauffement de la matière ou peut-être celle d'une incandescence
de l'âme, en recherche d'elle-même. Œuvres arrachées à l'incertitude, par le hasard des terres cuites, aux couleurs ocre sombre
et brune. Elles nous invitent, à saisir et à comprendre semble-t-il, ce qu'est l'indescriptible difficulté d’être et d'exister.
Les mains, à elles seules, nous font voir quelque chose encore non définie, dans un ailleurs chargé d'ombre et peut-être à la
recherche d'une lumière, d'un embrasement. La cuisson de la terre semble avoir donné d'ailleurs, plus de force à l'expression
en solidifiant définitivement, peau et relief osseux. Les portraits et bustes eux- mêmes, relevés par graphisme noir et blanc
insistant, révèlent cette persistance de la présence et de l'exceptionnel désir de témoigner.
Les œuvres peintes et les portraits, affirment un rayonnement différent. Ils sont éclairés et sortent de la pénombre en des couleurs assez vives.
Les traits et descriptions sont plus affirmés et semblent traduire une plus grande joie de vivre. Dessin et peinture y forment une belle alliance,
caractérisée par le souci, d'exprimer une présence, une émotion. Au réalisme qui s'en dégage, semble faire écho, le désir d’affirmer cette existence,
comme intrinsèquement ancrée dans la vérité, la spontanéité. Les thèmes abordés, empruntent aux femmes, le plus souvent, cette geste optimiste,
apte à éveiller les consciences et à évoquer une certaine considération.
L'Artiste, fait converger deux tendances complémentaires qui pourraient être contradictoires : entre les sculptures tournées vers le recueillement,
voire le retournement évoquant la tristesse, la difficulté d'être et les portraits peints qui annoncent plutôt l'éveil et la renaissance. Et nous
pourrions aussi évoquer les quelques représentations de Markus LÜPERTZ qui feraient écho au dithyrambe christique (par son lyrisme ou par ses exagérations).
Et c'est d'ailleurs en s'appuyant sur un « substantialisme » Spinozien, qui voyait l'homme comme un mode fini mû par le désir de persévérer dans son être,
que Julia BUNEL nous révélerait quelque chose. De l'ombre, émergerait cette conscience lumineuse adoubée par une mystique, offerte à nos interrogations.
On ne peut donc rester indifférent à ces quelques œuvres exposées. C'est toute une humanité qui se cherche là, sous nos regards et qui semble avoir
donné à cette Artiste le pouvoir de pétrir, de façonner la terre originelle et d'en peindre les manifestations heureuses ou malheureuses. Ce qui, en
cela même, constitue un style, une vocation en quelque sorte, celle d'en promouvoir les « êtres » en recherche d'une expression.
Chris Canter-Briens - Critique d'Art
Julia Bunel est une artiste sensible et expressive. Son trait vigoureux, parfois sombre, trace des portraits ou des scènes d'une grande âpreté, servis par une
technique éprouvée du dessin et de la peinture. Ses thèmes sont marqués par une certaine recherche d'exotisme et, à tout le moins, d'originalité dans l'alliage
des ambiances. Elle retient l'attention par la sûreté et la force de son geste. Voix, visages, corps à nu sont tendus par l'émotion qu'elle cherche à insuffler
à son œuvre. De cette façon, elle s'efforce de « tout donner » de ce qu'elle pense et ressent. Son réalisme parfois cru n'exclut pas, toutefois, l'onirisme et
l'intrusion recherchée de l'imaginaire. Voilà pourquoi l'œuvre insolite et singulière de Julia Bunel mérite incontestablement que l'on s'y attarde. Elle ne cherche
pas à flatter par la facilité ou la futilité mais au contraire elle creuse et approfondit sans cesse son art, avec une double exigence d'authenticité et de pertinence
qui attire l'attention.
Rémi HUPPERT, Écrivain
Après une longue phase exploratoire en peinture, ma recherche artistique s'est naturellement orientée vers l'étude en trois dimensions de la figure humaine.
Mais si la sculpture est pour moi une expérience récente en regard de la longue période passée à chercher mon « écriture » picturale, c'est aussi la technique
dans laquelle je me suis investie le plus ces dernières années. Désormais je modèle des personnages, des visages et des mains imaginaires tentant de trouver résonance,
authenticité et dialogue entre les deux approches pour faire surgir l'expressionnisme qui m'est propre, tout comme dans mes tableaux, dans lesquels j'ai progressivement
évolué vers une démarche introspective, une « écriture de l'intime » faite d'images personnelles, intuitives et spontanées.